La gestion participative des produits forestiers non ligneux comme moyen de limiter la pression sur les forêts humides camerounaises

Au Cameroun, les forêts tropicales humides subissent de nombreuses pressions d’origine anthropique. Outre l’exploitation industrielle à large échelle, qui est un des facteurs importants dans la dégradation de ces forêts, l’invasion accrue des populations des villes avoisinantes doublée des pratiques culturales au sein même des villages riverains achève de dégrader ces écosystèmes fragiles !

Pour palier à ce problème, les associations camerounaises se battent aux côtés des populations villageoises pour la préservation des forêts tropicales humides ainsi que la création d’alternatives économiques à l’exploitation non contrôlée de ces forêts.

Ainsi, pour ce mois de décembre de l’année internationale des forêts, FNE souhaite présenter les actions de Mme Christine Nkene Anjembe, Fondatrice/coordonatrice de l’association Earth and Live, et  correspondante de FNE au Cameroun.

Les communautés locales au cœur des actions pour la préservation des forêts humides au Cameroun

Les communautés locales sont les protecteurs premiers des milieux forestiers car ils en dépendent pour leur survie.

Malgré une paupérisation de plus en plus marquée et une dépendance accrue des populations riveraines vis-à-vis de la terre et des produits forestiers non ligneux, on constate une prise de conscience des différents acteurs suite à la raréfaction et la disparition progressive des espèces qui leur étaient utiles.

Christine Nkene Anjembe, à travers l’association Earth and Live travaille de concert avec les populations locales des villages des régions du Centre, de l’Est et du Sud dans la perspective d’une gestion intégrée et participative de leur terroirs respectifs.

L’initiative a commencé avec le village d’EKALI III à proximité de Mbalmayo, dans la région du centre, où Christine Nkene Anjembe travaille avec les communautés locales pour la protection des forêts humides à Raphia farinifera (palmier raphia) [1].

D’après les études exploratoires de Christine Nkene Anjembe réalisées sur une quarantaine de villages du Nyong et So’o (régions du centre Cameroun) : « En 2008 un hectare de forêt humide à raphia était détruit par an, dans un village de dix familles. » Elle ajoute « Depuis, le rythme n’a cessé de croître. De nombreuses parcelles sont attribuées aux populations allogènes pour le maraichage et le type d’engrais utilisé est polluant ! On assiste alors à un déboisement accéléré doublé d’une pollution massive des sols et cours d’eau sous-jacents, un vrai désastre ! »

L’exploitation participative des produits forestiers non ligneux porte ses fruits !

Grâce à l’implication des communautés locales vivant à proximité de Mbalmayo, plusieurs parcelles forestières ont pu être placées en défend (protégée totalement). Le prélèvement du palmier raphia par tous les acteurs devient contrôlé. Par ces actions, les populations comptent pérenniser ces terroirs par la gestion durable de ce Produit Forestier Non Ligneux (PFNL).

© Christine Nkene Anjembe

Le palmier raphia se développe en effet naturellement dans ces forêts. C’est un PFNL sollicité par ces communautés à des fins diverses : artisanat (tressage de nattes, paniers, lits, bancs, chapeaux), récolte de vin blanc. A cause de la pression de plus en plus accrue sur ce PFNL, il est récolté de plus en plus loin au cœur des forêts tropicales humides : d’où un double enjeu pour sa gestion durable par les communautés locales.

« L’importance de la gestion durable des produits forestiers non ligneux, tel que le palmier raphia suscite déjà une prise de conscience au sein des villages riverains quand à son prélèvement intelligent pour préserver la forêt. Les artisans et cueilleurs en sont conscients ! » explique Christine Nkene Anjembe.

Ces premiers essais encourageants montrent déjà leurs fruits puisque des espèces végétales caractéristiques de la reconstitution du milieu réapparaissent sur les parcelles mises en défend.

L’un des objectif à long terme vise la restauration écologique et cynégétique des ces zones humides périurbaines fortement anthropisées.

La prochaine étude exploratoire sera faite sur trois régions écologiques à savoir le centre, le sud et l’est à partir des cas liés à l’extension des terres agricoles à vocation maraîchère périurbaine.

Pour France Nature Environnement, l’implication directe des communautés locales est primordiale pour la préservation des forêts des pays du Bassin du Congo[2] car à l’instar du Cameroun, ce vaste ensemble présente des enjeux écologiques et sociaux similaires.

[1] A ne pas confondre avec le palmier à huile (Elaeis guineensis) faisant l’objet d’exploitation pour l’industrie agro-alimentaire et des cosmétiques dans de nombreux pays tropicaux.

[2] La Guinée Equatoriale, la République Centre Afrique, le Gabon, la République du Congo et la  République Démocratique du Congo