Actualité

Pollution de l'air : deux mois pour agir

Publié le 30 avril 2015

Si la France ne prend pas des mesures ambitieuses et efficaces d’ici deux mois contre la pollution atmosphérique, elle pourrait se retrouver devant la justice européenne. Comment échapper au procès ?

Deux mois pour agir contre la pollution de l’air. La Commission européenne a émis le 29 avril 2015 deux avis motivés qui obligent le gouvernement français à intervenir rapidement afin de respecter les règles européennes. Si la France ne réagit pas, l’affaire pourrait atterrir devant la Cour de justice de l’Union européenne qui rend les décisions obligatoires pour les Etats.


La nouvelle n’est pas une surprise pour la France : des lettres de mise en demeure avaient déjà été adressées en 2013 et 2014 sans grand résultat, malgré la mobilisation constante de France Nature Environnement sur le sujet. Puisqu’il reste deux mois, que peut décider la France pour échapper au procès ? France Nature Environnement fait le point.




Premier avis : la France trop inactive sur la question des particules fines




La Commission estime que la France n’a, depuis 2005, pas suffisamment limité l’exposition des Français à la pollution de l’air liée aux Particules fines (PM10). Il faut aujourd’hui qu’elle agisse «plus efficacement, rapidement et avec plus d’ambition». La Commission déplore qu’en France il y ait encore trop de jours de dépassement des niveaux autorisés (comme lors des pics de pollution de mars 2014 et 2015) et cela, dans de nombreuses villes (Paris, Lyon, Grenoble, Marseille, Point-à-Pitre (Guadeloupe), Vallée du Mont Blanc, Nice, Toulon, Douai).




En chiffres




La pollution de l’air liée aux particules fines est responsable de 42 000 décès prématurés par an et coûte entre 20 et 30 milliards d’euros en dépenses de santé par an en France, d’après les chiffres du ministère de l’Environnement. A titre de comparaison, le déficit de la Sécurité sociale en 2014 était de 15 milliards d’euros. Agir contre la pollution de l’air est donc une question qui concerne tant notre santé que les finances publiques.







Pour combattre rapidement la pollution, instaurons des Zones à faible émissions dans les villes




Si les secteurs de l’industrie, l’agriculture et le chauffage au bois émettent eux aussi des particules fines, le transport routier est l’émetteur qui nuit au plus grand nombre de personnes : la réduction de ses nuisances en instaurant des zones à basses émissions est à mener en priorité. Neuf pays européens ont déjà instauré ce dispositif avec des résultats plutôt concluants. Le principe consiste à développer l’auto-partage et le covoiturage, les transports en commun et d’autres solutions moins polluantes afin de réduire les émissions les plus proches des populations.



A Berlin, ce dispositif a été mis en place 2008. Résultat : une réduction de 58 % des particules en sortie d’échappement et - 19 % d’oxyde d’azote en moins dans l’air en seulement deux ans. Et puisque les effets du diesel sont ravageurs pour la santé, des mesures à court terme pour en réduire l’utilisation puis l’arrêter à moyen terme apporteraient également un grand bol d’air frais à nos poumons.




Deuxième avis : les Français respirent trop de soufre




La Commission européenne relève que la France n’a pas mis en œuvre la directive[1] qui vise à fixer des seuils de concentration de soufre dans les carburants utilisés dans les bateaux de transport de passagers (croisiéristes, paquebots) et de marchandises (tankers, porte-containers, etc.).


Des obligations à la fois internationales[2] et européennes exigent de ramener ces niveaux à 0,1% depuis le 1er janvier 2015 en Mer du Nord et 0.5% à partir de 2020 dans les autres zones (Atlantique et méditerranée).



Problème principal, les bateaux à quai continuent à faire tourner leurs moteurs pour se fournir en électricité, alors que les grands ports français se situent dans des zones densément peuplées (Marseille, Le Havre…). Une double peine environnementale pour les habitants, déjà exposés aux émissions du transport terrestre. Les ports devraient proposer des équipements électriques à quai, ce qui encore aujourd’hui est rarement le cas.




Coupons le courant quand le bateau est à quai




L’usage du transport maritime a quadruplé en vingt ans. Si rien n’est fait, l’ONG Transport&Environment (fédération européenne dont FNE est membre) estime que les émissions du transport maritime pourraient augmenter de 40 à 50% d’ici à 2020.



Pourtant, avec de simples mesures techniques tel que la mise en place de filtres à particules, un changement de carburant ou encore la réduction de la vitesse d’approche en vue du port, on pourrait réduire jusqu’à 70 % les émissions du transport maritime.





Le problème de la pollution de l’air est bien connu, les alertes envers l’État français sont récurrentes, qu’elles viennent de l’Europe ou de la société civile. Alors que la qualité de l’air est la préoccupation environnementale n°1 des Français, le temps n’est plus au constat ou aux mesures timides : agissons dès maintenant pour protéger la santé humaine et l’environnement !






[1] Directive 2012/33 du 21 novembre 2012