PPE/SNBC : Priorité à une transition juste pour les ménages et l’environnement

C’est avec plus d’un an de retard que s’est ouvert ce 2 novembre la concertation préalable sur les projets de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et de Stratégie nationale bas carbone (SNBC). Ces documents stratégiques vont guider l’action énergétique et climatique de la France pour la prochaine décennie, irriguer les stratégies régionales, et donc la vie des Français.es. Ils se doivent de rehausser les ambitions en s’appuyant sur des choix légitimés démocratiquement, scientifiquement et environnementalement,et d’apporter des mesures concrètes de mise en œuvre. Demandes de FNE. 

Les catastrophes en série doivent inviter à hausser l’ambition  

Conformément aux modélisations du GIEC, le réchauffement climatique déjà acquis se concrétise avec des successions d’années de plus en plus chaudes en Europe et dans le monde, des étés caniculaires et sec, des inondations violentes, durables ou à répétition… Pire, le réchauffement climatique s’accélère faisant craindre que les crises d’aujourd’hui deviennent le quotidien de demain. Pour stopper cette machine infernale, il est temps de mettre à niveau les ambitions énergétiques et climatiques pour protéger les populations, l’économie et l’environnement. Pour autant le gouvernement français reste frileux à s’aligner sur l’objectif européen de baisse de -55% des GES. De même, côté énergie, alors que l’on sait que les éventuels nouveaux réacteurs nucléaires (EPR2) voulus par le gouvernement n’arriveraient en service qu’après 2040, s’ils fonctionnent un jour, les efforts sur les énergies renouvelables proposés dans le projet de PPE sont loin de s’aligner sur les objectifs posés par l’Union européenne.  Aux risques climatiques s’ajouteraient alors des risques industriels et économiques d’un système énergétique surdimensionné, inapproprié, peu sobre et dangereux. 

La résilience du système énergétique et de notre société implique des choix technologiques et sociétaux légitimes et déterminés par le souci de protéger les populations, de ménager les ressources et de préserver les finances des risques futurs. La stratégie de l’Etat nous semble très risquée à ce stade. 

La PPE/SNBC de la dernière chance 

Pour FNE, cette PPE/SNBC est celle de la dernière chance, celle à pouvoir encore changer la donne pour 2030 et nous mettre sur la bonne voie pour 2050. Elle doit fixer des ambitions fortes en termes de réduction des consommations d’énergie et de matières, acter les mesures structurelles pour les atteindre, en particulier pour la rénovation performante des bâtiments et la mobilité. En effet, la sobriété mise au cœur de la stratégie française éviterait le surdimensionnement des besoins en investissements, en infrastructures de réseaux, en moyens de production d’énergie. Les énergies renouvelables doivent être davantage déployées, sur l’ensemble du territoire en veillant à une meilleure répartition entre régions, et sans contrevenir aux efforts menés par la stratégie nationale pour la biodiversité. Les efforts demandés aux zones peu denses et littorales au bénéfice principal des zones urbaines qui concentrent la consommation d’énergie, doivent être compensés. 

La concertation doit porter sur l’ensemble des alternatives 

Dans le cadre de cette concertation l’Etat est tenu de fournir un dossier complet et sincère de son projet de transition énergétique, présentant les alternatives possibles aux options privilégiées et indiquant les motivations ayant conduit à retenir ces options. Il se trouve que les choix sont encore ouverts et que plusieurs chemins sont techniquement et économiquement possibles, mais diffèrent quant à leur consommation de ressources et atteintes à l’environnement. Ces travaux de prospectives démontrent qu’un mix énergétique 100% renouvelable est possible techniquement et que les scénarios déployant la sobriété facilitent l’atteinte des objectifs climatiques et préservent le cadre de vie des Français et des Françaises. FNE proposera dans sa contribution des objectifs et mesures favorisant la réduction des consommations et des matières, la production d’énergies renouvelables respectueuses de l’environnement, permettant à toutes et tous de vivre dans un monde vivable. 

L’Etat doit respecter la loi  

Par ailleurs, la loi Energie Climat de 2019 impose la définition par le Parlement et la révision tous les cinq ans des principaux objectifs énergétiques et climatiques dans une loi de programmation, dont la PPE et la SNBC, définies ensuite par décrets, ne sont que les instruments de mise en œuvre. Le gouvernement a annoncé en avril, faute d’un possible consensus à l’Assemblée, vouloir s’affranchir de cette obligation et passer uniquement par un décret. Pour FNE il s’agit d’une très mauvaise idée, contraire à l’Etat de droit et qui pourrait s’avérer fragile juridiquement pour les projets à venir, compromettant l’atteinte des objectifs climatiques et énergétiques. Car tous les acteurs ont besoin de visibilité et de stabilité dans les engagements de l’Etat pour savoir dans quel cadre les projets pourront désormais se développer.  

“La transition écologique sera aussi une transition sociale : il est donc indispensable de construire un processus juste et efficace, reposant sur un consensus social, seul socle viable d’une transition profonde permettant de conserver un monde vivable. Le récit de la transition écologique réussie doit reposer sur autre chose qu’un techno-solutionnisme béat fermant la porte aux innovations sociales ”  

Nicolas Richard, Vice-Président de France Nature Environnement