Elle est omniprésente, et pourtant, on ne la remarque presque pas. Biodiversité, santé, consommation d’énergie : chaque année, la pollution lumineuse augmente en France et ses impacts sont de plus en plus nombreux. France Nature Environnement vous propose d’en comprendre les enjeux et de découvrir les solutions mises en œuvre partout sur le territoire.
Qu’est-ce que la pollution lumineuse ?
Le terme « pollution lumineuse » désigne les effets néfastes des éclairages artificiels, qui perturbent le vivant et participent au réchauffement climatique.
La lumière artificielle générée par ces éclairages se manifeste dans l’environnement de diverses façons : la lumière directe, la lumière réfléchie (par le sol, l’eau, les objets, etc.) et la lumière diffusée dans l’atmosphère. L’ensemble de ces manifestations forment un halo lumineux.
Ce phénomène est en constante augmentation : 85% du territoire hexagonal subit aujourd’hui des pressions dues à la pollution lumineuse (Observatoire national de la biodiversité), et la lumière émise, depuis les années 1990 a augmenté de 94% (ANPCEN).
Pourquoi faut-il se soucier de nos éclairages nocturnes ?
Les impacts préoccupants de l’éclairage artificiel sont nombreux.
- Sur la biodiversité : il perturbe le cycle de vie des espèces animales comme végétales et les parties éclairées du territoire sont rendues inutilisables et ont un effet « barrières » pour les espèces ayant besoin d’obscurité ;
- Sur l’espèce humaine : problèmes sanitaires et psychologiques ;
- Sur notre patrimoine commun : disparition du ciel étoilé et de sa connaissance.
- Sur la consommation énergétique : de nombreux éclairages sont surdimensionnés ou superflus, et sont à l’origine d’un gaspillage énergétique important.
Tout éclairage est néfaste et ses effets sur l’environnement dépendent de plusieurs facteurs : la quantité de lumière, la couleur émise (ou composition spectrale), ainsi que la temporalité de l’éclairage (durée, horaire, etc.).
La pollution lumineuse bouleverse l’alternance jour / nuit, ce qui a des conséquences directes sur la physiologie des êtres vivants, ainsi que sur leur comportement.
En effet, la confusion entre lumière naturelle et artificielle conduit à plusieurs phénomènes, d’attraction pour certaines espèces (ex. les insectes), de répulsion pour d’autres (ex. les chauves-souris).
Ces phénomènes ont des conséquences directes sur le comportement de ces espèces : désorientation dans la migration, modification des relations proie-prédateur, pièges, fragmentation du territoire, diminution des habitats nécessaires (reproduction, alimentation, repos, hibernation…), perturbation de la reproduction, ou encore décalages phénologiques pour les plantes et les arbres.
Pour aller plus loin :
Les cours d’eau qui passent sous nos ponts constituent des milieux de vie fragiles et essentiels pour de multiples espèces (insectes, poissons, amphibiens, etc.), mais aussi des espaces qui permettent à des espèces de se déplacer (corridors écologiques). Malheureusement les nombreux éclairages de nos villes et villages viennent directement perturber les espèces sensibles à la lumière artificielle qui s’y trouvent (attraction, répulsion, éblouissement, perte de repères spatiaux, barrières).
Par exemple, la lumière artificielle perturbe le comportement de certains poissons, notamment en les attirant ou en devenant une barrière à leur déplacement.
Un faible taux d’éclairement artificiel sur un milieu aquatique peut aussi suffire à perturber la reproduction des amphibiens et retarder la métamorphose des têtards, ou à diminuer le taux d’éclosion des œufs de certains poissons et le développement des alevins (Wikinight, FNE Midi-Pyrénées).
Pour aller plus loin :
L’alternance jour/nuit est la base du métabolisme de la plupart des êtres vivants. La luminosité qui résulte de la pollution lumineuse la nuit impacte la qualité du sommeil, et joue donc indirectement sur le stress et la concentration.
Par ailleurs, depuis plus de 20 ans, les politiques d’économies d’énergie et les évolutions technologiques favorisent l’utilisation des diodes électroluminescentes (LED) et notamment de la lumière bleue. Ces lumières bleues se multiplient, et leur impact est de plus en plus préoccupant : dans un rapport de 2019, l’Anses confirme la toxicité de la lumière bleue pour l’œil, ainsi que les effets néfastes d’une exposition à la lumière bleue, même faible, sur les rythmes biologiques et le sommeil (Anses). En ce sens, la lumière artificielle se révèle être un perturbateur endocrinien majeur.
Dans un contexte d’appel à la sobriété, agir sur la pollution lumineuse est un levier fort. Les éclairages représentent une part considérable de la consommation d’énergie : selon l’Ademe, l’éclairage public représente ainsi 41% de la consommation d’électricité des collectivités. De plus, la tendance au sur-éclairement, en calant les réalisations sur les maxima réglementaires, entraîne une plus grande consommation d’énergie.
Engager une démarche de sobriété lumineuse a donc de nombreux intérêts : réduire considérablement les factures, d’abord, mais aussi une action-clé pour la biodiversité. Elle est à portée de l’ensemble des acteurs : en réduisant l’éclairage au juste besoin, en choisissant les installations et projets les plus vertueux en termes de performance environnementale : sobriété énergétique, absence de lumière perdue et faible émission de bleu. Pour se faire, il est possible de s’appuyer sur les étiquettes environnementales pour choisir les installations.
Pour aller plus loin :
- Ces étiquettes environnementales, non-officielles à ce jour, vous sont proposées par FNE pour choisir les éclairages les moins impactants ! Retrouvez-les ici !
Comment agir pour faire cesser la pollution lumineuse ?
Contrairement à d’autres formes de pollutions, la pollution lumineuse cesse dès l’extinction de la lumière ! Nous avons donc un pouvoir pour agir, chez nous, mais aussi dans notre commune et sur tout notre territoire. Découvrez ci-dessous des actions individuelles ou collectives que vous pouvez engager pour lutter contre la pollution lumineuse près de chez vous.
Adopter la sobriété lumineuse chez soi est une première étape. Voici quelques pistes pour engager une démarche et limiter l’éclairage artificiel au strict nécessaire :
- Limiter les sources d’éclairage aux seuls endroits où c’est nécessaire : vérifier que chaque point lumineux est utile, et qu’il éclaire uniquement la zone souhaitée. A ce titre, il s’agit de limiter l’éclairage en réorientant les émissions vers la zone utile, en supprimant les débordements de lumière et en évitant d’éclairer le ciel !
- Réfléchir à la temporalité de l’éclairage, c’est éteindre lorsqu’on n’a pas besoin de lumière, et donc limiter la durée de l’éclairage aux besoins.
- Adapter le niveau d’éclairement à ses besoins : on peut aussi agir en réduisant l’intensité et le nombre de points lumineux et en choisissant les couleurs de lumière les moins impactantes.
Parler de sobriété lumineuse, c’est aussi parler de sobriété énergétique, car l’éclairage est une source considérable de notre consommation d’électricité.
C’est aussi parler de sobriété d’aménagement, dans la mesure où l’éclairage est aussi une source d’artificialisation des territoires et de fragmentation des habitats. Cette sobriété passe donc aussi par une réduction et une sélection des infrastructures et des matériaux, dans une perspective de réduction de la consommation des ressources.
Sentinelles de la Nature, c’est un projet porté par France Nature Environnement qui a pour vocation de créer une communauté citoyenne connectée, partout en France, pour géolocaliser les dégradations des milieux naturels, accompagner les citoyens dans leur résolution, et promouvoir les pratiques vertueuses !
Animé par des référents du mouvement FNE dans l’ensemble du territoire, de nombreuses ressources sont mises à votre disposition pour travailler, ensemble à la protection de la nature et de notre environnement.
Sous la forme de maraude, puis de campagne Sentinelles, de nombreux éclairages interdits, inutiles et nocifs ont été identifiés. L’objectif : sensibiliser les responsables aux enjeux de la pollution lumineuse, identifier les lieux où il est prioritaire d’agir et illustrer le plaidoyer national pour la réduction de la pollution lumineuse.
Alors vous aussi, créez un compte sur Sentinelles de la Nature, signalez les atteintes à l’environnement et faites rayonner les initiatives vertueuses pour la Nature.
L’échelon communal est un échelon clé pour agir sur la pollution lumineuse, que ce soit sur l’éclairage public, ou sur l’éclairage privé. C’est le maire qui est chargé de faire respecter la réglementation, et vous pouvez donc l’interpeller pour montrer que le sujet tient à coeur à ses administrés.
Agir sur l’éclairage public
Entre 1992 et 2012, le nombre de points lumineux liés à l’éclairage public a augmenté de 89%. Pour les communes, agir sur l’éclairage public est un enjeu environnemental, mais aussi économique, puisque l’énergie consommée par l’éclairage public représente 41% des consommations d’électricité des collectivités territoriales (Ademe).
Le potentiel de réduction des nuisances lumineuses pour les communes est énorme, que ce soit en passant par un diagnostic de la pollution lumineuse sur la commune (suivi d’une réduction du nombre de lampadaires d’une réduction potentielle des intensités lumineuses) ou par l’extinction de l’éclairage public en cœur de nuit, aujourd’hui mis en place dans de nombreuses communes.
Respecter et faire respecter la réglementation sur les éclairages
Le maire doit aussi agir sur les éclairages privés, puisqu’il dispose du pouvoir de police pour faire respecter la réglementation, notamment par les acteurs socio-économiques. Vous pouvez donc aller à la rencontre de votre mairie pour demander de faire respecter la réglementation !
La Trame Noire est le principal outil des politiques d’aménagement du territoire choisi par l’Etat pour prendre en compte les besoins d’obscurité des écosystèmes. Les associations du mouvements FNE appuient les collectivités pour le déploiement de la Trame Noire dans les territoires.
L’outil Trame Noire recense les zones d’obscurité, les zones éclairées, les éclairages et les enjeux de biodiversité sur un territoire (présence d’espèces sensibles à la lumière artificielle, leur besoin ; les espaces déjà identifiés comme important pour la biodiversité comme la trame verte et bleue, les aires protégées…).
Ce diagnostic permet ensuite d’identifier les continuités écologiques (réservoirs de biodiversité et corridors écologiques) sans éclairage artificiel existantes, des espaces éclairés ainsi rendus inaccessibles à certaines espèces pour accomplir leur cycle de vie et des obstacles lumineux.
Sur cette base, la Trame Noire liste les actions à mettre en œuvre pour préserver ces continuités nocturnes et pour supprimer l’éclairage des axes de déplacement et des espaces nécessaires à accomplissement du cycle de vie des espèces et les obstacles lumineux identifiés. Il servira aussi de base à la mise en place de solutions pour favoriser la nature et l’environnement la nuit.
- Si la Trame Noire matérialise des espaces où l’on porte une attention particulière aux interactions éclairage/obscurité/nature, elle ne doit pas justifier le droit de faire n’importe quoi ailleurs. En effet, comme pour la trame verte et bleue, il est nécessaire de diminuer les pressions, dont la pollution lumineuse, sur l’ensemble du territoire pour préserver la biodiversité.
Le mouvement FNE est conscient que la Trame Noire est un nouvel outil qui permet de se placer en interlocuteur objectif pour le bien de la nature et l’environnement.
Le devenir de la planète vous questionne ? Vous avez envie d’agir, de vous impliquer à nos côtés ? C’est en devenant bénévole d’une association locale, nationale ou correspondante que l’on devient bénévole dans le mouvement France Nature Environnement ! Les associations du mouvement France Nature Environnement accueillent toute l’année de nouveaux bénévoles.
Dans nos associations, toutes les bonnes volontés sont bienvenues : œil de photographe, « Géo Trouvetou » des bonnes pratiques écolos, sauveteur de petites et grandes bêtes, fin pédagogue, explorateur et admirateur de la nature, plume qui aime chatouiller le papier pour exprimer des idées, vidéaste en herbe, organisateur au poil, dessinateur, animateur, féru d’informatique, passionné des chiffres, juriste, jardinier du dimanche… Quelles que soient vos disponibilités et vos compétences, il y a sûrement une activité pour vous !
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