Laetitia Félicité "J'ai découvert un monde qui vivait à côté de moi sans que je le voie"

Laetitia Félicité est éducatrice à la nature et formatrice pour adultes au sein de Bretagne Vivante, à Rennes.

Qui es-tu ? Que fais-tu ?

Je suis éducatrice à la nature et formatrice pour adultes au sein de l’association Bretagne Vivante depuis 10 ans, sur le territoire de l’Ille-et-Vilaine (35). J’ai un parcours atypique car j’ai fait des études en psychologie puis un BTS Gestion et protection de la nature ensuite. Aujourd’hui je vois bien le lien entre les 2 car l’humain est au cœur de mon métier. À Bretagne Vivante, j’occupe des missions assez variées : animation tout public, formation, création de supports et d’outils pédagogiques… auprès de publics qui le sont tout autant, des petits de maternelle aux élus communaux, en passant par les animateurs socioculturels que j’accompagne à mettre plus de dehors dans leur pratique.
 

Pour toi, l’éducation et la sensibilisation à l’environnement et à la nature (ESEN) c’est quoi ? Qu’est-ce qui t’a amenée à te tourner vers ce domaine ?

Vaste sujet ! Contrairement à beaucoup de mes collègues, je n’ai pas baigné dedans depuis toute petite. J’ai grandi dans une grande ville, au milieu des tours et des parkings. Mon espace de jeu était plutôt les descentes de garages et les aires de jeu sur béton que la forêt. C’est venu plus tard, vers mes 18 ans, quand j’ai eu ma première voiture et que mes envies de vadrouille m’ont emmenée du côté de la Bretagne et des ces espaces de nature que j’ai commencé à photographier. C’est par l’entrée paysages que je suis venue à m’intéresser à l’environnement en général. Et là j’ai découvert un monde qui vivait à côté de moi sans que je le voie. Je me suis investie dans des associations naturalistes et d’éducation à l’environnement chez moi en Seine-Maritime et mon regard n’a plus jamais été le même. Mon monde s’est agrandi, enrichi des autres êtres vivants non humains. Je dirais que, selon moi, l’éducation à la nature se fait avant tout au contact de celle-ci, par une expérience sensorielle et émotionnelle, par ce sentiment d’être reliée à quelque chose de plus vaste qui me dépasse, qui était là avant moi et qui le sera après mon court passage sur cette terre.

Sur quoi travailles-tu en ce moment ?

Je travaille, entre autres, sur la duplication d’une malle pédagogique sur la thématique du jardin. Cet outil a été créé par un collectif d’associations bretonnes dont Bretagne Vivante fait partie et nous souhaitons équiper plusieurs territoires bretons, voire au-delà car pour le moment il n’existe qu’un exemplaire à Rennes. Je travaille aussi sur les liens santé-nature, sujet que j’aborde de plus en plus avec les publics professionnels que j’accompagne.

De quel projet es-tu particulièrement fière ?

Outre la malle «Ensemble jardinons au naturel», je suis particulièrement fière du MOOC Jardiner avec le vivant conçu avec le même collectif interasso. C’était une première expérience pour nous avec un enjeu à l’échelle nationale. J’ai appris plein de nouvelles choses et cela a renforcé notre collectif de travail de porter ce projet ensemble. Une belle aventure qui a réuni plus de 13000 personnes.

Si tu pouvais faire 3 vœux pour l’éducation à l’environnement ?

1. Que le secteur, le métier et les professionnels que nous sommes soient mieux reconnus. C’est un secteur qui souffre parfois d’un manque de crédibilité et dont la nécessité n’est pas toujours reconnue. Or quand on connaît les enjeux de santé publique d’une éducation à et dans la nature, notre domaine est juste indispensable.
2. Des moyens évidemment. Les projets «bouts de ficelle» ont leur charme mais ils ont aussi leurs limites.
3. Que celles et ceux dont ce n’est pas le métier, prennent confiance et se sentent aussi légitimes à mettre du dehors dans leur pratique, dans leur acte éducatif. En somme, démocratiser nos pratiques.
4. Et je triche avec un quatrième vœu : que les enfants jouent de nouveau dehors (cabanes, jeux dans les ruisseaux, chasse au trésor…) et pour cela offrons-leur des espaces de nature proches et accessibles car nous n’avons pas tous la chance d’avoir un bois à notre portée.

Ton plus beau souvenir ?

Ah c’est difficile mais je dirais que mon vécu le plus intense se situe pendant le séjour estival itinérant que nous organisons chaque année depuis 4 ans pour les 11-14 ans. Quatre jours d’aventure dans la nature, de rires, de cohésion, de découverte, de balades, de feu de bois, de jeux… Vivre dehors au grand air !
 

Si tu étais un autre animal ?

Il parait que mon animal totem est le rapace. C’est vrai que les chouettes, hiboux, busards m’accompagnent dans mes lieux de vie. A moins que ce soit moi qui les suive. Allez savoir :)
 

Si tu étais un végétal ?

Une ortie pour son côté piquant mais tellement utile. Ou un lierre car c’est la plante du lien par excellence.
 

Un message pour les lecteurs•trices ?

Je conclus ce portrait par une citation de Thoreau «Ce n’est pas ce qu’on regarde qui est important mais ce qu’on voit». A méditer au pied d’un grand chêne :)