Bilan de la qualité de l’air 2012 en France : encore irrespirable et intolérable

9 mois après la remise des données par les associations de surveillance de la qualité de l’air, le Ministère de l’Ecologie vient de publier le Bilan de la qualité de l’air en France pour 20121 et les principales tendances de la période 2000-2012 : « L’année 2012 reflète une tendance à l’amélioration de la qualité de l’air par rapport à l’année précédente pour les polluants réglementés », soit, mais il ne faut pas que cela nous détourne des vrais enjeux ! Explications de France Nature Environnement (FNE)

On ne peut pas compter que sur la crise…



Un mieux est en effet constaté sur certains polluants, il n’est pas forcément la conséquence de mesures efficaces mais plutôt de conditions météorologiques favorables ou d’une baisse des activités du fait de la crise économique. Malgré cette légère baisse les émissions de certains polluants² et leurs concentrations dans l’air sont encore bien au-dessus des seuils Européens³ et des recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé⁴ (OMS).



Aux Français la facture, aux pollueurs les bénéfices



D’importants problèmes demeurent du fait de la présence des ces polluants. Si la France a été mise en demeure par la Commission Européenne pour ces bilans qualité de l’air 2010 et 2011, elle pourrait l’être pour 2012⁵ et 2013 de la même façon ! « Faut-il attendre que la France soit condamnée à plusieurs centaines de milliers d’euros d’astreinte par jour pour réagir enfin ?⁶» se demande José Cambou, secrétaire nationale et pilote du réseau santé-environnement de FNE.



Les impacts sanitaires, via l’exposition de populations toujours plus nombreuses aux polluants atmosphériques, ne sont pourtant plus à démontrer. Il en est de même des impacts environnementaux ou encore des dégradations du patrimoine bâti, qui sont autant de coûts supportés par les citoyens et la collectivité. Les coûts sanitaires, de la seule pollution de l’air extérieur, par exemple, sont évalués entre 20 et 30 milliards d’euros par an pour la seule France métropolitaine⁷.



Des mesures « indigentes et incantatoires »



Ni les nouvelles technologies de motorisation et de filtrage, ni des pseudos plans d’urgence ne résoudront le mal chronique qui atteint la qualité de l’air français.

Les filtres à particules pour efficaces qu’ils puissent être ne sont qu’un infime partie de la solution. Pour augmenter leur efficacité ils devraient équiper tous les véhicules actuellement en circulation et pas seulement les neufs. Par ailleurs l’utilisation de catalyseurs d’oxydation pour diminuer les rejets de particules a aussi pour conséquence directe l’augmentation des émissions de NO2 autre polluant atmosphérique…

En termes de choix politiques apprécions : après avoir abandonné les Zones d’Action Prioritaires pour l’Air (ZAPA), mis en place un Comité Interministériel sur la Qualité de l’Air (CIQA), décidé d’un Plan d’Urgence de la Qualité de l’Air (PUQA), lancé la révision de tous les Plans de Protection de l’Atmosphère (PPA)… les pouvoirs publics n’ont toujours pas résolu la question, loin s’en faut !



FNE réaffirme ses positions et propose



Une réduction des pollutions issues des transports ; nous devons transporter et nous déplacer mieux et autrement : optimiser les déplacements, développer les modes collectifs, partagés (transport en commun, co voiturage, auto partage) et actifs (marche et vélo) qui sont autant de solutions à notre portée.



Une vraie mise en cohérence des politiques publiques. En matière de transports et d’aménagement pour s’attaquer en amont aux déplacements inutiles. Dans le domaine de l’air et du climat également : en effet certains polluants comme le Black Carbon (BC), dont les émissions ne baissent toujours pas, ont des effets à la fois sur la qualité de l’air et le réchauffement climatique. Les études toxicologiques indiquent que le BC pourrait opérer comme transporteur universel de produits chimiques, toxiques pour le corps humain⁸.



L’adoption ensuite de législations sectorielles pour réduire les émissions de toutes les sources majeures et s’attaquer enfin aux pollutions agricoles, celles des systèmes de chauffages, des engins de chantiers, des pollutions maritimes,… qui ont une part de plus en plus importante !



La mise en oeœuvre et le respect des normes de qualité de l’air actuelles de l’UE et leur renforcement à la lumière des dernières recommandations de l’OMS. A titre d’exemple, l’espérance de vie à 30 ans pourrait augmenter de 8 mois en moyenne dans les grandes villes françaises, soit une centaine de décès évités chaque année, si on respectait les valeurs guides OMS sur les particules fines⁹.



« L’air est irrespirable ,c’est ce que nous disent tous les indicateurs bloqués sur le rouge. Il n’y a pourtant pas de fatalité et il n’y a pas meilleure arme pour nettoyer l’air que la volonté politique. L’air doit devenir une priorité politique de premier plan et le budget 2014 devra en témoigner » affirme Bruno Genty, Président de France Nature Environnement.

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¹http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/bilan-qualite-air-2012.pdf
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/bilan-qualite-air-2012…. />
²PM, NOx,…

³Stratégie communautaire de surveillance de la qualité de l’air et Directives 2004/107/CE du 15 décembre 2004 et 2008/50/CE du 14 avril 2008

⁴http://www.airparif.asso.fr/_pdf/normes-OMS-revision-2005-resume-2006-VF.pdf
http://www.airparif.asso.fr/_pdf/normes-OMS-revision-2005-resume-2006-VF… />
⁵Pour les particules fines (PM10), encore 16 agglomérations de plus de 100.000 habitants ont eu au moins un site où la valeur limite journalière de 50 µg/m3 a été dépassée plus de 35 jours ; et 7 sites ont même dépassé la valeur limite annuelle de 40 µg/m3 à Nice, Paris et Fort de France. Pour les dioxydes d’azote (NO2) encore 20 agglomérations de plus de 100.000 habitants ont eu au moins un site, en proximité de voies routières, où la valeur limite annuelle de 40 µg/m3 a été dépassée.

⁶Lors d’un CIQA, Delphine Batho a évoqué une amende estimée à 11 millions d’euros, en plus d’astreintes journalières de 240.000 euros par jour, jusqu’à ce que les valeurs limites de qualité de l’air soient respectées, «soit au moins 100 millions d’euros la première année et 85 millions d’euros par la suite», selon la ministre.

⁷Rapport de la Commission des Comptes et de l’économie de l’environnement concernant « la santé et la qualité de l’air extérieur » juillet 2012.

⁸http://www.euro.who.int/fr/what-we-publish/abstracts/health-effects-of-black-carbon
http://www.euro.who.int/fr/what-we-publish/abstracts/health-effects-of-b… />
⁹EtudeInVS-ARS Centre, mars 2013